lundi, juin 14, 2010

Un chevreuil raconte...


Ce jour là, j'étais bien au repos, enfoui dans l'herbe haute, non loin d' un des deux épiceas du fond du jardin, le plus large, celui qui me protége le mieux de la pluie qui tombe en abondance en ce moment. Les jeunes pousses du roncier voisin en formation sont encore bien tendres et me fournissent de temps en temps un divertissement appétissant.

Il est arrivé sans bruit, armé d'un grand ciseau à herbe et il a commencé à sectionner de grandes touffes de cette herbe dure parfaitement immangeable, juste bonne à intéresser un botaniste; celle qu'il a introduit l'année dernière est en épi depuis quelques jours.

Parfaitement invisible, je suivais ses mouvements réguliers et je ne bronchais pas lorsqu'il grogna un peu après des plantes récalcitrantes qui résistaient au traitement. Il resta un moment au même endroit, tout proche certes mais tout occupé à son travail, et moi bien tranquille.

Il fit encore quelques métres et entrepris d'arracher un groupe de quelques pieds fleuris d'Achillée millefeuille. Sans hâte, je me levais de mon abri discret, je contournais l'épicea et je profitais de son inattention pour esquisser quelques pas silencieux en direction du haut du terrain, là où se situe l'ouverture habituelle où je pénétre dans ce paradis paisible, fleuri et nourrissant que constitue ce jardin sauvage inhabituel. D'ordinaire, les jardins ont une végétation basse constituée d'herbes rases et de légumes alignés comme des troupes à l'exercice. Rien de tel ici: herbes hautes et arbustes fleuris en massifs épais forment un décor plus touffu que le sous-bois voisin où je me sens trop rapidement repéré. Il est vrai que le jardinier, qui vieillit un peu , n'est plus trop souvent là au moment où l'herbe pousse, et ceci compose un décor un peu négligé.




Tout d'un coup, il marcha plus rapidement vers la direction où je me tenais , et je me sentis obligé d'assurer au mieux ma sortie du terrain. C'est alors qu'il s'aperçut de ma présence et me regarda en souriant. Discrétement, je remontais sur la pelouse herbue, fleurie et ignorée de la tondeuse, vers la maison, et je pris la direction du bois proche, jouxtant la luzernière, que l'agriculteur du coin cultive spécialement pour moi. Dans ce bois, à cette heure-ci, je ne risque pas de me faire repérer par le président des chasseurs de la commune, qui habite à deux pas d'ici. De toute façon la chasse est fermée en ce moment et les tirs d'été n'ont pas encore commencé. Et puis ils préfèrent tirer sur les renards.




Il n'y a pas à dire. Ce petit coin reste bien calme pour un chevreuil discret comme moi, et j'ai bien l'intention d'y revenir souvent. On m'a assuré que le monsieur jardinier qui porte une grande barbe comme le Père Noël ne ferait pas de mal à une mouche..

Et pourtant il les attrape parfois , puis les relâche ensuite, après avoir baragouiné quelques mots incompréhensibles.

Drôle d'habitude tout de même.


4 Comments:

Blogger Elisabeth.b said...

Mes amitiés au visiteur et à monsieur le jardinier. Merci à tous deux.

mardi, juin 15, 2010 9:34:00 AM  
Anonymous Donna said...

Superbe photo du chevreuil !

Et je suis toujours contente de voir d'autres jardins sauvages...

samedi, juin 19, 2010 11:46:00 AM  
Blogger Jean Pierre J. said...

Le mien reste un sauvage organisé, du moins j'essaie...

dimanche, juin 20, 2010 2:34:00 PM  
Blogger ao said...

cette visite au jardinier était un vrai plaisir (surtout lue depuis un bureau en plein coeur d'une capitale...) et ces photos toutes vertes de véritables respirations!

jeudi, juillet 01, 2010 12:29:00 PM  

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